Attention, ici on va parler pédagogie (un peu) et organisation de classe en version production minimale de déchets. Le zéro déchet a une belle place dans la famille Verte, et commence à envahir notre sphère professionnelle. Pour ma part, enseignante en école élémentaire, cette année j’ai organisé ma classe en gardant en tête cette idée de réduction du gaspillage. Mon idéal : tendre vers la classe zéro déchet. Toutes mes idées ne sont pas encore en place, mais la plupart s’intègrent naturellement dans ma pratique quotidienne, en voici un aperçu.
Le classique bac à recyclage
Toutes les classes dans lesquelles je suis allée ces cinq dernières années sont équipées du classique bac ou sac à recyclage. À côté de la poubelle, il a pour vocation évidente d’accueillir tous les déchets recyclables de la classe, principalement les feuilles de papier.
Les élèves connaissent bien son usage, mais il faut régulièrement faire des mises au point sur ce que l’on y met, et notamment connaitre les consignes de tri de son agglomération pour éviter certaines erreurs. Et si des rappels ponctuels ne suffisent pas à éviter les erreurs de tri, alors il est important d’envisager au plus vite une séquence pédagogique sur la gestion des déchets. Cela fait partie des programmes, et chaque niveau de classe verra cette thématique traitée de manière de plus en plus aboutie.
Voici quelques exemples de fournitures scolaires et leur destination en fin de vie (Attention, il peut y avoir des variations selon votre lieu de vie : en effet, certaines agglomérations recyclent beaucoup plus de types de plastiques que d’autres.)
Type de déchet | Recyclage | Poubelle à ordures ménagères |
Mouchoirs en papier | x | |
Feutres et stylos | x | |
Feuilles de papier | x | |
Chutes de papier | x | |
Emballages plastique (pour intercalaires ou autres) | x | |
Pochettes plastique perforées | x | |
Velleda et autres feutres à ardoise | x | |
Etuis en carton | x |
Le bac à papiers de brouillon
Dans ma classe, il se vide comme il se remplit ! Mes élèves savent que l’on ne met pas de papier à moitié utilisé dans le bac de recyclage : on le conserve pour le bac à papiers de brouillon.
Ces papiers sont en libre service, et peuvent servir autant aux activités pédagogiques (recherche, découpage, tracés sur papier blanc) qu’aux activités personnelles des élèves. Il y a d’ailleurs plusieurs compartiments selon le type de feuille de brouillon : A4 blanc, A4 à carreaux et chutes de papier. On garde même les bandelettes, qui peuvent servir à faire des bandes de numération, à la construction de figures géométriques, ou encore pour aborder les fractions !
La diminution des photocopies
Un commentaire de la mairie, qui nous a indiqué l’augmentation du budget photocopies, m’a incitée à soumettre le problème à mes élèves lors d’un conseil de classe. Comment faire moins de photocopies ? Globalement, l’idée principale qui en est ressortie, c’est qu’il y aurait moins d’exercices photocopiés. Surtout pour les CE2 et les CM1, qui disposent de manuels et de fichiers collectifs qui fournissent une base importante d’exercices. Pour les CE1, il y a encore des photocopies, mais seulement lorsque les exercices ne peuvent pas être réalisés à partir d’une vidéoprojection.
De la manipulation
Beaucoup de manipulation, avec du matériel durable. On entre un peu plus dans la question des choix pédagogiques… En mathématiques notamment, nous utilisons beaucoup la manipulation de matériel pour la découverte d’une notion et son approfondissement. Pour ces séances de manipulation, je préfère utiliser du matériel bien plus durable que du simple papier : ainsi, mon set décimal (en plastique) sert beaucoup pour travailler la numération et les techniques opératoires. Il est bien solide et profitera à plusieurs générations d’élèves avant de devenir un déchet !
Je précise qu’avec une classe à triple niveau, mes groupes sont assez restreints lors des séances de découverte : de ce fait je n’ai pas besoin de multiplier les exemplaires de matériel.
Voici une liste de ce type de matériel dont je dispose pour l’instant dans ma classe, à titre d’exemple :
- le set décimal mentionné ci-dessus,
- les timbres Montessori (même type d’usage),
- plusieurs matériels issus de la pédagogie Montessori : tables de la multiplication et de la division pour un entrainement plus individuel,
- un gros lot de cubes de numération à encastrer,
- des réglettes Cuisenaire,
- des formes géométriques (type Attrimaths),
- un grand nombre de bâtonnets.
Des supports d’exercices réutilisables plusieurs années
Les manuels scolaires constituent une banque d’exercices intéressante, et sont réutilisables plusieurs années dans la mesure où l’on vérifie la correspondance des exercices choisis avec les programmes en cours.
Dans le même style, il existe d’autres types d’outils issus de la pédagogie Freinet : les fichiers d’entrainement. Ceux-ci sont constitués de fiches (souvent rangées dans un classeur) que l’enfant emprunte lorsqu’il en a besoin puis qu’il rend au classeur collectif. La méthode PIDAPI, que j’ai introduite dans ma classe, fournit également une grande quantité d’exercices par compétence travaillée (chaque enfant avançant à son rythme), qui complète bien les activités faites en « tronc commun ».
Pour ces supports, il n’y a pas besoin de faire de photocopies, et les fichiers Freinet ou classeurs PIDAPI peuvent durer des années si les fiches sont bien protégées (encore une fois, il faut tout de même vérifier la concordance avec les programmes !).
Les jeux sous formes de cartes que l’on trouve beaucoup en mathématiques ou en français constituent également de bons supports, solides et durables. Là aussi, leur utilisation individuelle selon le rythme de chaque enfant ou avec de petits groupes d’élèves évite des photocopies inutiles.
Attention à la plastification !
Il existe une autre manière de rendre les supports d’exercices et activités plus durables dans le temps : la plastification. J’utilise par exemple, dans ma classe, des cartes de conjugaison type recto-verso (question d’un côté, réponse de l’autre) que j’ai plastifiées après impression. Ces cartes servent beaucoup pour l’automatisation des procédures (notamment en calcul mental, conjugaison, orthographe) et pour la mémorisation. Elles sont utilisées sans problème d’une année sur l’autre, parfois sur plusieurs niveaux différents.
Cependant, lorsque l’on crée ce type de cartes, mieux vaut être sûrs de leur qualité, et bien faire attention à leur contenu et à leur bonne impression avant de plastifier… Sinon, bonjour les déchets dans la poubelle à ordures ménagères !
Quels consommables dans la classe zéro déchet ?
Stylos, craies, feutres, feutres à ardoises,… Il y a beaucoup de petits consommables dans une classe, et certains sont à fuir complètement !
Les feutres à ardoises
Pour ma part, mon premier défi est de régler son affaire au fameux Velleda, ou feutre à ardoise ou à tableau blanc. Ceux qui en utilisent quotidiennement connaissent leur faible durée de vie et leur horrible tendance à se rendre complètement inutiles en fin de vie, quand ils ont totalement perdu leur éclat initial ! Le problème est le même pour les élèves qui ont des ardoises blanches : ils usent tellement vite leurs feutres qu’ils doivent toujours réapprovisionner et, quand ils sont à court et que le réapprovisionnement tarde à venir, ils viennent se servir dans le stock de la maitresse qui se demande ensuite pourquoi ses feutres s’usent aussi vite…
Voici donc plusieurs solutions alternatives au Velleda classique :
- les crayons de type « O’color » ou « Woody » : sorte de crayon de couleur destiné à écrire sur les ardoises et tableaux blancs. Ils sont assez durables et ne produisent pas de déchet (sauf quand on les taille), mais le rendu est bien sûr moins net qu’avec un feutre.
- les feutres à recharge type Pilot V-board : rendu excellent, bonne durabilité, et on ne change que la cartouche quand elle est vide. En revanche, à l’achat, c’est la fête aux emballages : un sachet plastique par cartouche de recharge, même quand on commande plusieurs cartouches ! Dommage…
- sinon, si vous en avez, le bon vieux tableau à craie reste une option durable et zéro déchet, puisque le craie finit en poussière. Cependant, à l’ère des vidéoprojecteurs, ce tableau a tendance à disparaitre des classes. Par contre, pour les ardoises, l’option est tout à fait satisfaisante : parmi mes élèves, ceux qui ont opté pour l’ardoise à craie n’ont jamais été à court de matériel pour écrire sur leur ardoise !
Les feutres et les crayons de couleur
Les premiers offrent des couleurs tout à fait séduisantes. Malheureusement, comme leurs amis destinés aux ardoises, ils ont tendance à se dessécher rapidement et à venir agrémenter la poubelle de déchets ménagers (dans la plupart des agglomérations qui ne les recyclent pas… faites-moi signe si chez vous, les feutres sont recyclés !). Alors, je tends à leur préférer leurs cousins, les crayons de couleur, si possible fabriqués avec du bois issu de forêts gérées écologiquement et avec des pigments naturels. Ils sont durables et donnent tout de même de jolies couleurs. De plus, si on pousse la démarche de classe zéro déchet à fond, on peut prévoir un petit bac de collecte des épluchures pour les mettre à composter (si les crayons ont été produits dans les conditions mentionnées ci-dessus). C’est un point que je n’ai pas encore mis en place dans ma classe, mais j’y songe sérieusement.
L’essuie-main
Dans ma classe précédente, les enfants s’essuyaient les mains avec un torchon en tissu, à l’ancienne. Et c’était très bien ainsi… Cette année, un gros rouleau d’essuie-main en papier trône près du lavabo, malheur à la poubelle qui s’en trouve remplie tous les soirs ! Là aussi, je pourrais très bien apporter cette légère modification : placer près du lavabo un torchon en tissu pour limiter le gaspillage.
Aller plus loin dans la classe zéro déchet
Il y aurait d’autres actions à mettre en place pour réduire encore les déchets de la classe, en impliquant les familles. Ainsi, avec une sensibilisation des élèves et de leurs parents, et une liste de fournitures scolaires intégrant cette dimension là, on pourrait encore progresser. De plus, une reconnexion à la nature, comme à la ferme des enfants, viendrait soutenir cette démarche. Mais ceci est une longue histoire, qui pourra faire l’objet d’un nouvel article…
Coucou,
il existe plusieurs manières de collecter les instruments d’écriture en tout genre. Bureau Vallée, Bic, Cultura collectent les stylos et Terracycle a un programme lié aux instruments d’écriture. Dans ma classe, cela fait partie des collectes quotidiennes.
Pour les feutres effaçables, outre les crayons effaçables que tu mentionnes, il y a aussi des versions rechargeables à partir d’un petit flacon d’encre, y compris pour l’écriture fine. Je peux te donner des références sur ce que j’utilise dans ma classe. Mais cela demande un peu de manip pour recharger régulièrement les feutres (et donc du temps). Je le fais depuis plusieurs années, y compris avec les velledas et ça marche pas mal. Je passe en général un flacon d’encre par an et ne change les feutres que quand l’embout est vraiment usé. A bonne entendeuse…
Bonne idée, les feutres rechargeables ! Pourrais-tu me donner les références de ceux que tu utilises, que j’ajoute ton idée à l’article ?
Je précise quand même que j’ai eu quelques mauvaises surprises avec les feutres Pilot V-board, au delà du surplus d’emballage à la réception de ma commande: par exemple, une mine rapidement enfoncée par des petites mains peu précautionneuses… Mais si les feutres dont tu parles sont à l’épreuve de tes élèves, tant mieux !
Merci pour votre article, je propose quelques pistes pour aller plus loin : lors de la fameuse commande de cahiers, éviter les couvertures plastifiées pour les cahiers qui ne vont pas être promenés chaque jour. Pour limiter les plastifications, une impression sur du bristol fait bien l’affaire.
Cette année, en projet je vais réaliser avec mes élèves des lingettes réutilisables pour la salle de bain à l’aide d’une surjeteuse et de tissus récupérés (serviette éponge doublé tissu coton). Et réaliser des tawashis….
Super projet, je pense que vos élèves (et leurs familles) vont apprécier !
bravo
christiane